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Horitzó : ici, hier

Danièle Gibrat
    deegee@club-internet.fr
    75011 PARIS
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Le travail de Danièle Gibrat confronte des images à leur réalité. C’est, selon les propres mots de l’artiste, l’épreuve du réel. Faire des choses en vrai et les faire coexister avec leur double reproduit techniquement. Il ne s’agit, cependant, ni d’une mise en abyme ni de la n+1e variation sur le phénomène de la reproductibilité technique développé par Walter Benjamin. On serait, chez cette artiste, plus proche de l’art conceptuel d’un Joseph Kosuth, et de ses One and Three Chairs. Mais sa démarche ne se réduit en rien au modèle l’art comme idée en tant qu’idée.
     Il y a, tout d’abord, chez Danièle Gibrat, même si cela peut sembler paradoxal, une forme d’illusionnisme, non pas au sens de la peinture classique, mais en ce qu’elle cultive et exacerbe l’ambiguïté latente de toute réalité. Elle exploite notamment la subjectivité du regard et du point de vue de l’observateur qui voit apparaitre une image, mais doute de ses propres sens et est amené à s’interroger sur sa matérialité… à dénouer, à distinguer ce qui relève de l’évidence de ce qui est procédé. Elle place une chaise, très réelle, devant un dessin sur calque évoquant une fenêtre ouverte sur un panorama improbable. Une table se dissout dans sa propre photographie. Un paysage photographique se prolonge dans un dessin… lui-même photographié…. Elle intervient au stylo-bille sur des tirages photographiques pour les compléter et les dénaturer, au sens littéral de ce mot : leur ôter leur caractère naturel, les faire passer du règne végétal à celui des artéfacts… Elle n’hésite pas à laisser apparentes les marques de fabrication : pixellisation, déchirures, raboutages, bandes adhésives, imperfections… pour brouiller les pistes et provoquer une distanciation que le spectateur n’accepte qu’à son corps défendant.
     Danièle Gibrat résume fort bien sa démarche : « Ma version de la vérité, c’est le réel plus la subjectivité, le lieu commun et la part imaginaire qui s’y introduit forcément. » Par conséquent, loin du froid ascétisme des œuvres purement conceptuelles, l’artiste cultive une part de mystère et de secret, nous incite à deviner ce qui peut advenir au-delà de la présence matérielle des choses, au-delà même de leur éventuelle aura…

LD